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La vie est belle

Photo du rédacteur: Laetitia BaillyLaetitia Bailly

5h00 du mat’ “J’ai des frissons”ou “Paris s’éveille” disent les chansons.

Je m’éveille avec l’heure bleue et le chant des oiseaux. Etrange sensation à la fois paisible et oppressée. L’impression que quelque chose n’est pas comme il devrait être. Sans pouvoir conscientiser ce qui manquerait ou détonnerait. Juste le sentiment de devoir bouger les lignes.

J’abandonne mes rituels. Ce matin, pas de neti, pas de yoga, pas de méditation, une simple douche fraîche. Je me plonge dans la sensation de l’eau qui coule et la laisse dissoudre un peu mon curieux ressenti matinal.

Je marche. La rue est encore à l’ombre malgré le soleil qui monte à l’horizon. La boulangerie est fermée.

Les trottoirs sont jonchés de déchets, la ville est salie des excès de la veille. Un goéland me frôle, la vie est belle. Une voiture longe la plage à toute allure en vrombissant son irrespect. Le soleil levant encore invisible ici reflète sa lumière sur les vitres du vieil hôpital de briques rouges, la vie est belle. Quelques hommes finissent leur soirée dans le coffre ouvert d’un pick up ambiancé, leurs mots sont laids. Une famille au bord de l’eau photographie les sternes, la vie est belle.

A chaque pause, je pose quelques mots et l’étrange sensation se desserre. Je pense à Art-Mella et à sa magnifique BD sur les émotions. Ce noeud que je ressens ce matin, que tient-il emprisonné en moi ? Peut-être pas une part sombre… Au contraire, un part tellement lumineuse qu’elle se cache pour ne pas déranger…

A cet instant, dans le seul bruit des vagues, je m’allège, sans trop savoir pourquoi. Je m’absorbe dans la contemplation des falaises au loin.

Qu’est-ce qui forçait une porte de mon corps pour s’exprimer ce matin ? Qu’est-ce qui se libère ici dans le silence et les mots qui se couchent sur le papier ?

L’amour !

Je reçois tellement d’amour. Il est là, en moi. Il m’emplit, il me comble, il veut déborder.

Je reçois de vous qui me lisez en silence souvent et m’offrez aussi de si jolis mots. Je reçois de mes amis, présents, vivifiants. Je reçois de mes amours, inconditionnels, soutenants.

Je veux rayonner, laisser ce noeud se relâcher pour vous donner le meilleur, à chacun, à chaque instant. Je veux écouter, chanter, danser, regarder, photographier, dessiner, offrir, écrire et dire.

Le vent est frais. Deux serviettes oubliées m’attendent sur un banc abrité. Je me réchauffe et prends le temps de peindre la baie.

Je rentre doucement, une musique dans la tête : la triste voix de Mano Solo, l’air léger des gitans et des paroles d’une grande joie libre. “Leurs présences rayonnent sur le port, on sent qu’ils existent très for

t… Elle paraît chargée d’électricité…”

La boulangerie est ouverte. J’apporte le pain frais qui inaugurera cette journée.


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